Le rideau tombe à Dublin

Dans une de ses 7 vies, à cheval sur 2003 et 2004, Reza Hiwa vécu à Dublin. Il en tomba amoureux et livre ici cette histoire. 14 ans plus tard Reza nous amène dans un univers entre le réel et la magie pour nous enchanter. Dans ce recueil bilingue, franco-anglais, parfois surréel, à part deux histoires d’amour, l'une d'entre elles entre lui et Dublin, il nous parle de la Poésie, de ses étranges rencontres avec Patrick Kavanagh et Brendan Kennelly, de la Grande Famine du 19e …

Date de publication
25/03/2018
Nombre de pages
206
Prix
14.0 Eur
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Dédicaces
A mon frère John Queen
Reza Hiwa
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A mon frère John Queen

Tu m’avais promis qu’on se verrait à Dublin Ta ville Mais tu nous as quittés trop tôt Quand j’y étais encore Comme tu vois John Moi je tiens la promesse que tu m’as arrachée. Je publie ces poèmes Repose en paix

Reza Hiwa Le 3 mars 2018

To my brother John Queen
Reza Hiwa
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To my brother John Queen

You’d promised to meet me in Dublin Your city You left us too early When I was still there As you see John I keep the promise you had me make. I’m publishing these poems Rest in peace

Reza Hiwa 3rd March 2018

Préfaces
Deux mots
Reza Hiwa
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Deux mots

Reza Hiwa

Nous étions deux millions dans les rues de Londres à crier « Arrêtez la Guerre! » A Hyde Park. Et partout. Ce jour-là et cette foule m'ont bien réconcilié avec mon espèce. Nous y croyions vraiment ! Si nous arrivons à nous mettre ensemble aussi nombreux pour défendre les enfants que nous ne connaissons pas, alors être optimiste n'est pas si ridicule que ça.

Vous connaissez le reste de l'histoire. Quatorze ans plus tard, et pendant que j'écris ces lignes, cela continue encore. Ayant vécu une guerre entière et plusieurs à moitié, je savais ce qui arriverait aux petits irakiens si on échouait.

Si même le plus grand mouvement pour la Paix de l’Histoire, n’est pas assez pour empêcher une guerre illégale, que pouvons-nous faire de plus ? Ou différemment ? Alors que cette question ne me quittait plus, mon cauchemar récurrent de me voir ces petits irakiens dans les bras, à la recherche d'un abri. Dans mes cauchemars ces enfants avaient la tête des miens.

Cette guerre m’a maudit ! Et si j’en parle ici c’est pour dire dans quel état j’étais deux mois plus tard quand j’ai quitté Londres pour m’installer à Dublin.

A mon arrivée à Dublin, la ville m’a reçu comme un hôpital de la zone de guerre recevait une victime des « subtilités » collatérales de la guerre. Dedans j’étais un zombie ambulant, dehors tout allait bien ! C’est moi !

Comment Dublin a-t-elle réussi à transformer un zombie en un poète qui marche, et plutôt en bonne forme ? Personne n’est plus vivant qu’un poète qui écrit des poèmes d’amour.

Je tombe amoureux de la ville, la tête la première. La bonne nouvelle est que le sentiment fut partagé, je crois bien. La preuve ? Elle a mis deux de ses meilleurs fils sur mon chemin, Patrick Kavanagh et Brendan Kennelly. Ici je raconte le récit de ces rencontres. Si vous ne croyez pas à la magie cessez de lire ce livre.

Peu de temps après mon arrivée à Dublin, j’ai découvert que depuis un moment je signais mes poèmes de Dublin « Donnybrook, chez moi ». Cette signature était tout sauf une décision. Il a tout simplement glissé dans ma plume. Pourquoi ? Va savoir !

« Est-il si important de se sentir chez soi ? »

On ne marche pas de la même manière quand on se sent chez soi. Sous les pieds on ne sent pas le sol de la même manière. On trébuche moins. On grandit plus vite quand on se sent chez soi. On n’écrit pas de poèmes de la même manière. Chez soi, même nos poèmes tristes portent quelques rayons de soleil.

Reza Hiwa

Mars 2018

Two words
Reza Hiwa
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Two words

Reza Hiwa

We were two millions in the streets of London shouting "Stop the War". In Hide Park. And everywhere. That day and this crowd reconciled me pretty much with my specie. We were so upbeat! If we can get together this big to save the kids we don't know, then being optimistic is so ridiculous. You know the rest of the story. Fourteen years later, and as I write these lines, it is still unfolding. Having lived a full war and several half wars, I knew would happen to the Iraqi kids that if we failed. If even the largest Peace movement in the History is not enough to prevent an illegal war, so what can we do more? Or differently? While this question didn’t leave me any more, my recurrent nightmare became me having these Iraqi kids in my arms, looking for a shelter. In my nightmares the kids looked like mines. This war cursed me! And if talk about it it’s to say in which state I was, when two months later I left London to settle in Dublin. At my arrival to Dublin, the city received me like a war zone hospital receives a victim of collateral war “niceties”. Inside, I was a walking zombie while outside, everything was OK! That's me! How did Dublin manage to turn a zombie into a ticking poet, in a rather good shape? No one is in a more alive than a poet who writes the love poems. I fell in love with the city, head-first. The good news is that the feeling was mutual, I reckon. The proof? She placed two of her best sons across my path, Patrick Kavanagh and Brendan Kennelly. Here I tell the story of these encounters. If you don’t believe in magic stop reading this book. Shortly after my arrival to Dublin, I found that for some time I’d been signing my poems “Donnybrook / home”. This signature was anything but a conscious decision. It just slipped into my pen. Why? Who knows?

“Is it so important to feel at home?”

You don’t walk the same way if you feel at home. Under your feet the ground does not feel the same. You stumble less. You grow up faster when you feel at home. You don’t write the same poems. At home even your sad poems carry some sunshine in them.

Reza Hiwa

Mars 2018

Extraits
Rideau
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Rideau

[...]

Pourquoi ne peut-on pas appeler une histoire Celle qui n’a jamais commencé Mais qui s’est terminée si rapidement Qui s’est terminée certes ? Pourquoi ne peut-on pas appeler une histoire Un rêve éveillé Le fantasme délirant d’un scarabée Qui survit d’espoir S’accrochant à l’impossible ? Il est ce qu’il est Mais il est apparu comme un big bang Lorsque le trou noir de la guerre Avalait le poète Jour après jour Jamais auparavant, une histoire d’amour N’a été autant synonyme de paix Que celle que je vous raconte « Lira-t-elle jamais ces pages Pour y apporter quelques rayons de soleil ? » Quoi qu’il arrive J’ai gagné la Bataille Suprême J’ai aimé De nouveau Mesdames et messieurs Ceci devait être une histoire d’amour

2018-02-19#19.11

Liffey (EN)
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Liffey (EN)

Last night I opened up my chest Unveiled my secrets On the bridge Today The headlines all ask “Why is the old river boiling?” 11 Oct 2003 / 22.25 Dublin / IFI Café

Liffey (FR)
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Liffey (FR)

La nuit dernière J’ai ouvert ma poitrine Dévoilé mes secrets Sur le pont Aujourd’hui Les journaux titrent tous : « Pourquoi la vieille rivière bout ? » 11 Oct 2003 / 22.25 Dublin / IFI Café

Amitié maritime
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Amitié maritime

Du haut de ma falaise Je désigne un des oiseaux de mer Celui qui a l’air le plus sympathique Et je lui offre mon amitié En lui faisant coucou J’ai fait le premier pas 25 mai 2003 / 15.05 Port de Howth, En haut de la colline

Maritime Friendship
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Maritime Friendship

From the top of my cliff I point to one of the sea birds The one who looks most likeable And I offer him my friendship Waving hi to him I’ve made the first step 25 May 2003 / 15.05 Howth, Top of the cliff

Le grand témoin
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Le grand témoin

[...] Devant moi, ces statues géantes Le Mémorial à la Famine Une famille d’ex-hommes Les retardataires qui ont raté le dernier bateau Qui attendent depuis plus d’un siècle - J’imagine - Tous métamorphosés par la Grande Famine En cadavres qui peinent à marcher Des squelettes debout Emballés dans un sac en peau fripée Qui regarde fixement l’enfer L’un d’eux porte sur l’épaule Un ex-enfant Qu’est-il devenu ce petit ? L’ancêtre d’un petit Américain ? Ou le petit déjeuner d’un requin affamé ? [...] 2018-03-08#21.09

The Great Witness
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The Great Witness

[...] In front of me these huge statues The Famine Memorial A family of ex-humans The latecomers who missed the last boat And have been waiting more than a century Metamorphosed by the Great Famine Into corpses struggling to walk Standing skeletons Wrapped up in a bag of wrinkled skin Gazing at hell One of them carries on his shoulder An ex-child What became of that kid? Ancestor of a little American? Or the breakfast of a starving shark? [...] 2018-03-08#21.09

Poète, Editeur

Reza Hiwa est un poète, né à Téhéran en 1955 de parents kurdes immigrés dans un quartier ouvrier de Téhéran. Il grandit comme un immigré chez lui, obligé de cacher qu’ils étaient kurdes et que ses parents étaient sunnites. Il vit sa jeunesse dans ce quartier où se mélange la mosaïque ethnique du pays. La misère pousse toujours les laissés pour compte des provinces vers les métropoles.

Il entre à l'université pour réaliser le rêve des parents et devenir ingénieur, le symbole de la réussite sociale. Mais il a la tête ailleurs. Les veilles des examens il dévore Beethoven, Marx et Hugo, et au lieu d’étudier la résistance des matériaux il pense à une autre résistance.

Il se bagarre contre deux dictatures et finit en exil. Le voilà en France, père de trois enfants. Un autre cadeau de la vie lui fait parcourir l’Europe.

Il prétend qu'il est poète car il a découvert la femme chez lui et qu'il doit tout à l'amour des femmes.

Il trouve enfin son livre fétiche, l’Homme, qu’il lit avec boulimie. Il préfère les conversations de trottoirs aux querelles savantes.

Il dit qu’il est né pour semer. Semer même quand tout fait croire qu’il est seul, isolé et marginal. Semer malgré la sécheresse et l’inondation. Semer les mots d’amour ne peut apporter que la Paix après tout.